JAMIE WINGFIELD || Vicomte de Powerscourt

once upon a time Enniskerry, ce nom ne vous dit certainement rien. Pourtant, croyez-le ou non, cette ville dont le quota d’habitant ne dépasse pas les 2000 personnes, regorge de surprise. Il faut dire que si vous cherchez la tranquillité, et l’anonymat, vous êtes les bienvenues. Ma famille fait partie de l’une des plus riches de la ville. Depuis des générations, les Wingfield sont producteurs de Whisky, mes ancêtres sont d’origine irlandaise. Je vis toujours dans le château familial, le domaine de Powerscourt est dans la famille depuis des générations, la Reine Elisabeth elle-même l’a offert à mon arrière-arrière-arrière-grand-père le vicomte Richard Wingfield. Vous l’aurez certainement compris, je ne suis pas un simple habitant lambda.

Ma famille étant catholique, depuis mon enfance, je dois mettre les pieds régulièrement à l’église, tout comme le reste de ma fratrie. Malgré la fortune de mes parents, nous vivons simplement. Toute ma vie est ici, mes amis, ma famille… et celle que j’aime. Enfin cette dernière partie est assez compliquée… laissez-moi vous expliquer.

Toute mon adolescence, je l’ai passé avec mes amis d’enfance. Nous étions inséparables. Au fil des années, on grandit, nos corps changent et la fichue puberté pointe le bout de son nez. Il y a cette amie avec qui vous êtes complice depuis des années, et il y a ce jour d’été où vous vous baignez au lac au bord de la maison de campagne familiale… Elle était là, dans son maillot de bain deux pièces, ses cheveux blonds descendant en cascade sur ses épaules. Ce jour-là, j’ai senti une différence dans le regard que je posais sur elle… il y avait une attirance qui n’existait pas avant. J’ai passé tout l’été à mes poser des questions, et surtout à oser aborder le sujet avec elle. Hazel avait un an de moins que moi, mais nous nous sommes toujours côtoyés, nos parents fréquentaient la même paroisse. Finalement, nous avons commencé à sortir ensemble à la rentrée. Entre elle et moi, c’était tellement naturel, je n’ai jamais eu une relation si fusionnelle. Nous étions en couple depuis quelques mois déjà quand il y a cette dispute chez les Whyte, Hazel est arrivée en pleur chez moi. Mes parents étaient d’accord pour qu’elle reste vivre chez nous, ils l’adoraient. Nous filions le parfait amour jusqu’à ce jour maudit.

J’avais demandé Hazel en fiançailles le jour de ses vingt-cinq ans. Elle avait accepté, et quelques mois plus tard nous organisions une fête dans ce lieu où tout a commencé… la maison de campagne des Wingfield. La maison en bois était remplie, nos familles respectives étaient là, nos amis. Des chandelles ont été installées dehors, mon père s’occupait du barbecue, son chandail sur les épaules, tandis que ma mère servait des boissons aux invités. C’était la soirée de rêve qui s’est terminée en cauchemar. Hazel devait retourner en ville pour aller récupérer quelque chose qu’elle avait oublié, elle insista pour ne pas que je l’accompagne. Louis, son meilleur ami et Leah, sa sœur, l’ont accompagné. J’ai regretté de ne pas avoir pris le volant ce soir-là. Ma future femme a eu un accident, leur voiture a été percutée par une autre. Depuis ce jour, Hazel est dans le coma. Ma vie était devenue un enfer, je passais mes journées à l’hôpital, je ne dormais plus. Les jours passaient et se ressemblaient… je n’arrivais plus à avancer sans elle. Heureusement pour moi, ma famille était là pour moi. Nous avions prévu de nous installer ensemble à Dublin, mais je suis retourné vivre chez mes parents après l’accident.  

Trois ans se sont écoulés depuis l’accident, Hazel était toujours dans le coma et les médecins ne voulaient plus se prononcer sur un quelconque réveil. Je m’étais plongé corps et âme dans mon travail au sein de l’entreprise familiale. J’ai commencé à déconner, enchaînant les conquêtes d’un soir pour oublier que la seule femme que j’aime ne se réveillera peut-être jamais.

Et il y a eu ce jour… enfin, cette heure-ci précisément : 9 h 44. Mon téléphone sonne, c’est Leah la sœur d’Hazel. Je décroche, et en une fraction de seconde, ma tasse de café se brise sur le sol et son liquide s’étend sur le carrelage. « Elle est réveillée. » Mon cœur bondit dans ma poitrine, j’ai le souffle court. Je passe ma main dans mes cheveux, et manque de m’effondrer. J’ai envie d’aller la voir, j’attrape mes clefs de voiture et sort de mon appartement… mais une fois dans mon automobile la vérité m’explose en pleine face. Qu’est ce que je vais bien pouvoir lui dire ? Que va-t-elle penser de ce que je suis devenu ? Et merde… je suis resté là pendant près de deux heures, et j’ai fini par abandonner. Je suis remonté dans ma chambre, j’avais tellement honte de mon comportement de ces derniers mois. J’allais devoir faire face à tout ça, mais en avais-je la force ?